Projet de thèse SPECIFICS

Offre Projet de thèse : Evaluation des performances technico-économiques et environnementales de systèmes de culture riches en légumineuses et économes en pesticides

Evaluation des performances technico-économiques et environnementales de systèmes de culture riches en légumineuses et économes en pesticides, une contribution à la transition agroécologique.

Projet de thèse 2024 - 2027

Encadrement : Stéphane Cordeau, Maé Guinet et Nicolas Munier-Jolain, UMR Agroécologie, Dijon
Lieu : UMR Agroécologie, Dijon
Début de la thèse : Octobre 2024

Enjeux scientifiques

L’agriculture doit répondre à de nombreux défis environnementaux, économiques et sociaux. Parmi eux, la nécessité de réduire l’usage de pesticides, dont la pérennité de leur usage est questionnée du fait de leurs effets néfastes sur l’environnement et la santé humaine (Beketov et al., 2013; Nicolopoulou-Stamati et al., 2016; Tang et al., 2021). La diminution constante des substances actives autorisées en France, et l’augmentation des cas de résistances aux pesticides (Délye et al., 2020), nécessitent de développer des pratiques alternatives pour gérer les bioagresseurs (Barzman et al., 2015), telle que la diversification des cultures (Guinet et al., 2023). Par ailleurs, la France présente une balance protéique largement déficitaire qui est compensée par l’importation de légumineuses à graines pour l’alimentation humaine et de soja depuis l’Amérique pour l’alimentation animale (Voisin et al., 2014). Malgré la diversité des modes d’insertion des légumineuses dans les systèmes de culture et leurs nombreux intérêts environnementaux (réduction d’intrants azotés, diminution des émissions de gaz à effet de serre,…) et nutritionnels (richesse en protéines), les légumineuses ne représentent qu’une très faible part de la surface agricole utile Française (Magrini et al., 2016). Dans un contexte de verrouillage socio-technique au profit des céréales et oléagineux, les légumineuses, notamment à graines, sont souvent dépréciées pour leurs sensibilités aux bioagresseurs et stresses abiotiques et la variabilité de leurs rendements. Face à ce constat, le projet ANR SPECIFICS (sustainable pest control in fabaceae rich innovatif cropping systems), financé par le plan d’investissement d’avenir France2030 dans le cadre du programme « Cultiver et Protéger Autrement » (PPR CPA) dans lequel la thèse s’inscrit, a pour objectif d’identifier et d’évaluer des systèmes de culture économes ou sans pesticides et riches en légumineuses.

La thèse a pour ambition : 

  • d’apporter des connaissances scientifiques sur les stratégies d’insertion des légumineuses dans des systèmes de culture économes en pesticides ;
  • de caractériser ces systèmes en terme de stratégie de gestion
  • d’évaluer les conséquences de leur adoption sur le plan de la productivité (nature des produits récoltés, rendements), de la rentabilité, de la réduction des impacts environnementaux, et sur des critères sociaux, comme la faisabilité en terme d’organisation du travail.

La diversité des situations de production devra être prise en compte, car les solutions techniques pour concilier richesse en légumineuses et faible ou absence d’usage de pesticides à l’échelle des systèmes
de culture ne sont probablement pas les mêmes dans des contextes de production différents (sol, climat, environnement socio-économique).
La thèse se propose de traiter ces questions pour la filière des grandes cultures (y compris polyculture-élevage), en valorisant les données produites par le réseau de fermes DEPHY et les plateformes expérimentales de CA-SYS (INRAE Dijon) et ABY (INRAE Bourges).

Dispositifs mobilisés dans la thèse

Depuis 2018, les plateformes CA-SYS et ABY expérimentent huit systèmes de culture agroécologiques (Petit et al., 2021). Ces systèmes de culture cherchent à éprouver la pertinence de l’arrêt du recours aux intrants de synthèse au profit de la valorisation des interactions biotiques assurées par la biodiversité cultivée et sauvage au sein d’un parcellaire riche en infrastructures agroécologiques (125ha pour CA-SYS et 90ha pour ABY). Les systèmes de culture sont conduits sans produits phytosanitaires, soit selon les principes de l’agriculture de conservation avec ou sans élevage, soit avec travail du sol avec ou sans recours à de l’azote exogène. Ces systèmes de culture sont plus ou moins riches en légumineuses introduites comme culture de rentes en pure (ex : soja) ou en association (ex : blé/pois) ou en tant que plantes de services (ex : colza associé à de la féverole, du trèfle, du fénugrec). Le suivi régulier des systèmes de culture et le relevé des pratiques agricoles a pour objectif de tester leur faisabilité et d’évaluer leurs performances économiques, environnementales et sociales. Les systèmes expérimentés sur CA-SYS ont fait l’objet d’une première évaluation sur les campagnes 2020 et 2021 et ont été comparés à des systèmes de culture de référence mis en place par des agriculteurs voisins de la zone de Fenay, que l’UMR Agroécologie de Dijon suit depuis 2004. Cette première analyse s’est focalisée sur un nombre restreint d’indicateurs (indice de fréquence de traitement pour les systèmes de culture de la Zone de Fenay, rendements, marge semi-nette et temps de travail).

L’étude de ces systèmes de culture agroécologiques testés localement permet d’avoir une compréhension fine du fonctionnement des systèmes et de leurs performances. Néanmoins les résultats obtenus sont dépendant des contextes de production dans lesquelles sont expérimentés ces systèmes. Ainsi, une approche complémentaire consistera à travailler sur le réseau de fermes de démonstration DEPHY afin d’évaluer une diversité de systèmes de culture intégrant des légumineuses, en prenant en compte l’effet du contexte de production. Ce réseau, constitué aujourd’hui d’environ 2000 agriculteurs engagés dans une démarche de réduction d’usage de pesticides, constitue une source de données unique pour traiter de questions d’agronomie systémique en lien avec l’usage des pesticides et la multiperformance. Il est constitué d’un grand nombre de systèmes de culture très divers en terme de contextes de production, de part de légumineuses dans les rotations, de stratégies de conduite des systèmes de culture et de niveaux d’usage de pesticides. Les pratiques sont décrites annuellement et de façon suivie dans le temps sur plusieurs années (les fermes les plus anciennes sont suivies depuis près de 12 ans). Des travaux antérieurs mobilisant cette base de donnée ont permis :

  • d’identifier les leviers les plus fréquemment mobilisés (diversité des rotations, travail du sol, diversité variétale, désherbage mécanique, réduction de la fertilisation azotée, réduction de doses…) par les agriculteurs économes en pesticides (approche synchronique, Lechenet et al., 2016), ou ayant réduit leur usage de pesticide au cours du temps (approche diachronique, Nandillon et al., 2024), tout en tenant compte de la diversité des contextes de production.
  • de montrer que dans la majorité des situations, les systèmes à faible usage de pesticides étaient aussi productifs et aussi rentables que des systèmes plus dépendants des pesticides dans des contextes de production similaires (Lechenet et al., 2017).
  • de montrer que la diversification des systèmes de culture permet de réduire l’usage de pesticide à l’échelle des cultures (Guinet et al., 2023) et des rotations (Zhang et al., soumis)

Dans l’ensemble de ces travaux, la place des légumineuses dans les systèmes de culture économes en pesticides n’a pas été explicitement étudiée, et c’est en cela que la thèse propose un projet original.

Objectif de la thèse

Le projet de thèse se positionne dans le domaine de l’agronomie des systèmes de culture et ambitionne de traiter de questions scientifiques sur la base de données factuelles sur les pratiques, les performances et le contexte pédoclimatique et socio-technique de systèmes expérimentés en station ou mis en œuvre chez des agriculteurs.

Le projet de thèse a pour objectif de poursuivre l’évaluation multicritère des systèmes expérimentés sur les plateformes CA-SYS et ABY, en comparant leurs performances à des systèmes de référence locaux, en mobilisant un plus grand nombre d’indicateurs (ex : balance azotée, efficience énergétique) et en considérant l’ensemble de la période 2019-2023, année à laquelle les systèmes de culture conduits sans travail du sol ont été reconçus.

Le projet de thèse vise également à poursuivre la valorisation des données du réseau DEPHY en grandes cultures et polyculture-élevage, afin i) d’identifier la diversité des modes d’insertion des légumineuses dans les systèmes de culture à travers une large gamme de situations de productions, ii) d’étudier la possibilité de concilier des systèmes riches en légumineuses et économes ou sans pesticides et iii) de comparer les performances de ces systèmes par rapport à des systèmes sans légumineuses au sein du même contexte de production. L’ambition est d’évaluer les conséquences qu’aurait la généralisation à l’ensemble du territoire national des systèmes de culture riches en légumineuses et économes en pesticides, compte tenu de la diversité des contextes de production, sur le plan de la quantification de la réduction d’usage des pesticides, de la performance économique des exploitations, des volumes de production, de l’autonomie de la ferme ‘France’ en protéines végétales, et sur le plan de la balance commerciale agricole.

Profil recherché

  • Ingénieur ou Master 2 en agronomie
  • Sensibilité à l’approche système
  • Intérêt pour l’analyse de données
  • Bonne maitrise du logiciel R
  • Rigueur, organisation et approche structurée du travail
  • Bonne maitrise de l’anglais à l’écrit et à l’oral (niveau B2)

Localisation du stage : Dijon – UMR Agroécologie
Indemnités : 2.100 € brut mensuel
Candidature : CV et lettre de motivation à envoyer à stephane.cordeau@inrae.fr; mae.guinet@inrae.fr ; nicolas.munier-jolain@inrae.fr.
Date limite pour postuler : 15 juin 2024

Références

Date de modification : 29 mars 2024 | Date de création : 29 mars 2024 | Rédaction : Rédacteur